Le role géopolitique

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LE ROLE GEOPOLITIQUE DE

LA TURQUIE

 

Un regard sur la carte de cette partie du monde montre effectivement la position géographique exceptionnelle de la Turquie entre 1'Europe des Balkans et l'Asie d'une part et le Caucase et le ProcheOrient pétrolier d'autre part. Cette position vaut à Ankara de bénéficier, depuis l'intégration de la Turquie à l'OTAN, en 1952, d'une généreuse rente de situation de la part de ses alliés occidentaux, notamment américains et allemands. En contre - partie de ses bases et autres stations d'écoute sous le ventre mou de la Russie Washington a, an cours de dix derniers années, accordé 7,8 milliards de dollars d'aide militaire à la Turquie. Il fournit actuellement à celle-ci 85% de son armement. De son coté l'Allemagne a, depuis des décennies, fait de la Turquie la principale récipiendaire de ses surplus d'armement. Rien qu'en 1994 Bonn a ainsi fait don de 300 chars de l'ancienne armée de la République démocratique allemande (RDA), 100 chars Léopard, 45 bombardiers Phantom, 250.000 Kalachnikovs, 100.000 missiles antichars à son allié turc.

Malgré la fin de la guerre froide et la dislocation de l'Union soviétique Ankara continue de bénéficier de cette rente de situation et cela continuera dans le cadre de l'OTAN, avec on sans l'entrée de la Turquie dans l'union douanière.

Cela étant dit, on peut aussi regarder de plus prés cette carte de la Turquie pour constater que, hormis peut être la Géorgie, la Turquie a des relations tendues et conflictuelles avec tous les Etats voisins. Un autre fait de portée stratégique: en Turquie d'Asie, hormis un petit bout de frontière avec la Géorgie, les seuls voisins terrestres des Turcs sont des Kurdes peuplant de part et d'antre les frontières de la Turquie avec la Syrie, l'Irak et l'Iran et tonte la zone frontalière avec l'Arménie et la province azérie de Nakhitchévan. La partie stratégique de la Turquie, recelant l'essentiel de ses ressources hydrauliques, pétroliers et minières est précisément le Kurdistan qui est le théâtre d'un conflit dévastateur. Outre son coût humain et économique énorme (12,5 milliards de dollars en 1994, selon le ministre turc de l'intérieur cité par le Turkish Daily News du 29 janvier 1995), ce conflit creuse chaque jour davantage le fossé entre l'Etat turc et la population kurde martyrisée.

A moins de réduire la géopolitique à la simple géographie, la valeur et la fiabilité d'un Etat allié doivent se mesurer à sa stabilité interne. L'exemple du Chah d'Iran qui avec sa "cinquième armée du monde" devait jouer le rôle de gendarme régional de l'Occident, celui du " régime laïc et moderne " de Saddam Hussein, "rempart contre l'intégrisme islamique" est encore dans tontes les mémoires.

Excédée par tant de souffrances et de persécutions et par l'indifférence des Occidentaux, voire leur complaisance envers Ankara, la population kurde pourrait finir par basculer massivement dans le rejet de l'Etat turc, se réfugier dans l'islam ou, en cas de conflit avec un Etat voisin, s'allier avec ce dernier. Il ne s'agit pas d'une hypothèse d'école mais d'un schéma d'évolution bien probable. Commentant la récente réunion à Moscou, dans une salle du Parlement russe, du "Parlement kurde en exil", proche du PKK, le député conservateur allemand H. Lummer a ouvertement évoqué le danger d'un basculement des Kurdes de Turquie dans le camp de la Russie. L'aide inconditionnelle fournie à un régime turc martyrisant sa population kurde finira par perdre la Turquie comme elle a perdu hier les régimes iranien et irakien.

Fins politiques, les sultans ottomans avaient compris la position géopolitique exceptionnelle des Kurdes, à qui, dès 1515, ils avaient accordé une très large autonomie, s'assurant ainsi 3 siècles de paix à leur frontière orientale. Depuis l'abrogation de ce statut, Kurdes et Turcs ne cessent de se faire la guerre. Et cela risque de continuer tant que les Kurdes, très attachés à leur identité, n'auront pas obtenu une maîtrise autonome de leur destin sur leur propre territoire.