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LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME

 

La documentation à ce sujet résumée par le rapporteur du Parlement européen est aussi variée que concordante. Les principales ONG occidentales des droits de l'homme - Amnesty International, Human Rights Watch, Fédération Internationale des droits de l'homme, France-Libertés, International Law Group - ont publié des rapports accablants sur la destruction de plus de trois mille (3.000) villages  kurdes, les exécutions sommaires des opposants, l'emploi systématique de la torture, les disparus, l'assassinat de plus de deux mille civils par des escadrons de la mort de la contre-guérilla turque, les procès expéditifs à l'issue de gardes - à - vue de 30 jours dans les régions kurdes, le sort des trois millions de paysans kurdes chassés de leurs terres et condamnés à la misère. Files ont également dénoncé les meurtres de civils et les exactions perpétrés par le PKK contre les membres des milices pro-gouvernementales (protecteurs de village) on contre les fonctionnaires civils turcs. Cela ne les a pas empêchées d’être qualifiées, par la Turquie d'alliées objectives du terrorisme. Ankara a ainsi déclaré parsonna non grata le responsable pour la Turquie d'Amnesty International ainsi que Lord Avebury, président du Parliamentary Human Rights Group britannique. En février 1995 une mission du Congressional Human Rights Foundation américaine, dirigée par l'ambassadeur Blackwell s'est vue refuser l’accès de la ville de Lice, en grande partie détruite par l'armée turque. Le co-président de la Commission Helsinki du Congrès américain, Te sénateur D'Amato, en visite à Ankara, reçut également un refus turc à sa demande d’enquête dans les régions kurdes. En octobre 1994 le secrétaire d'Etat-adjoint pour les droits de l'homme américain, M. John Shattuck, n'a pu, malgré son insistance, rendre visite à la province de Tunceli ou 1'armée venait d’évacuer et brû1er plusieurs dizaines de villages kurdes.

Le Kurdistan turc, placé sous le régime d'état d'urgence et livré à l'arbitraire total de 1'armée et de la police, est soumis à un black-out de fait.

Ni les médias, ni les ONG ni les missions d'observation n'y ont libre accès. Pour avoir enfreint cette règle et diffusé une dépêche sur la destruction de villages kurdes par 1'armée une journaliste américaine de l'agence Reuters, Mile. Aliza Marcus, a été poursuivie par la Cour de sûreté de l'Etat d'Istanbul pour "incitation a' la haine raciale". A la suite de fortes pressions de 1'administration et du Congrès américains elle fut finalement acquittée mais le message d'intimidation est passé; les journalistes n'osent plus aller enquêter dans les provinces kurdes où la plupart des violations massives des droits de l'homme sont perpétrées.

Ayant constaté la pratique massive et systématique de la torture dans les commissariats et les prisons turcs le Comité contre la torture de l'ONU a, au 21 novembre 1993, décidé de rompre sa règle de confidentialité pour alerter 1'opinion sur la situation en Turquie.

Enfin, ceux qui seraient sceptiques à l'égard des rapports des ONG pourraient se référer au très officiel Rapport annuel sur les droits de 1'homme du Département d’état américain, paru en février 1995, qui consacre 36 pages, bourrées de fais, à la Turquie dont un résumé réalisé par le quotidien turc Turkish Daily News est reproduit plus loin dans ce dossier.

Même en Turquie, jamais sous un gouvernement civil, les violations des droits de l'homme n'avaient pris une telle ampleur. Au point où le ministre turc chargé du droits de 1'homme, M. Azimet Köylüoglu, a dû dénoncer publiquement "le terrorisme d'Etat" (voir le Monde 13 octobre 1994). Il fut, évidemment, rapidement rappelé à 1'ordre et dut, à la première occasion, quitter ses fonctions ministérielles figuratives.