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Il a certainement fallu des jours entiers pour la mise en place des échafaudages afin de pouvoir enlever les fresques de la voûte de l'abside et du soubassement cylindrique de la coupole. On ne peut guère s'imaginer que ces travaux remarquables aient été faits sans la connivence des militaires postés ici. Tout est détaché des murs: 1' impressionnant Jésus Pantocrator dans le dôme et l'éminente Mère de Dieu avec l'enfant Jésus ainsi que les archanges Michel et Gabriel dans l'abside, l'inscription, mais aussi le baptême et la marche au temple de Jésus Christ. Même l'iconostase avec toutes ses icônes a été volée. Cette Maison de Dieu ressemble a une étable. On dit qu'une partie des fresques a été acquise par une collection particulière américaine pour un million de dollars. Beaucoup doit avoir été détruit pour toujours a cause d'un démontage impropre.
Le même jour je suis confronté tragédie bouleversante de Varosha, au sud de Famagouste. Depuis des générations la cathédrale gothique de Famagouste est sous l'emblème du croissant. Jusquà 1974 le faubourg moderne de la ville portuaire du Moyen Age était le centre de l'industrie touristique de Chypre. Plus de trente mille Chypriotes grecs ont été forcés de quitter la ville du jour au lendemain. Etant en fuite devant les soldats turcs ils abandonnèrent tous leurs biens. Ils n'emportèrent que ce quils pouvaient ramasser a la hâte. Il s'agissait pour chacun de sauver sa vie. Seize ans plus tard personne ne sait lesquels des biens abandonnés a Varosha ont peut-être été épargnés par les pillages. Varosha est aujourd'hui une ville-fantôme. Ce lieu est hermétiquement barré par les militaires, entouré d'une clôture en barbelé, et seules les troupes turques peuvent y entrer.
Trikomo, dans la baie de Famagouste, est sur le chemin vers la péninsule qui sétend sur environ soixante quinze kilomètres vers le nord-est. Une vieille chypriote grecque veille sur léglise de Panayia Theotokos, qui date du milieu de l'ère byzantine. Dans ce village vivent aussi cinq autres vieilles femmes, toutes âgées de plus de quatre-vingt-dix ans. Habité autrefois que par des Chypriotes grecs, Trikomo est aujourd'hui un lieu favori des Turcs. A la demande des clés de léglise on ne reçoit qu'un silence glacial. Ce n'est qu'après plusieurs questions que nous sommes informés que la "police locale" devrait avoir la clé. Les "policiers" veulent savoir ce qui est si exceptionnel dans le "bâtiment", ce qu'il y est dintéressant, notamment a lintérieur. Après des discussions rendues difficiles par des problèmes de langue on va chez la vieille femme grecque. C' est elle, et non pas la "police locale", qui a la garde des clés de léglise. La femme habite dans une cabane en fer-blanc semblable a une étable. Elle n'a pas de revenu et n'est pas en contact avec les habitants turcs Elle mène une vie misérable et solitaire. Le prêtre orthodoxe - grec vient une fois par semaine et célèbre la messe pour les femmes.
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